Les Roches du Diable

Les Roches du Diable est le nom d'un site naturel situé dans le département du Finistère entre les communes de Querrien, Guilligomarc'h et Locunolé.
 
 
Le site des Roches du Diable est en fait le résultat du travail d’érosion effectué par la rivière l’Ellé.

Permettez-moi un petit retour historique sur cette rivière avant de passer aux Roches du Diable en elle-même.
De tous temps, l'Ellé a constitué une frontière naturelle entre deux territoires. Pendant l'Antiquité, elle séparait le pays des Osismes à l'ouest du pays des Vénètes à l'est, deux peuples gaulois qui cohabitaient alors dans la péninsule armoricaine.
Par la suite, le tracé de la rivière a constitué une limite entre les comtés de Cornouaille et du Bro Waroch ainsi qu'entre les diocèses de Quimper et de Vannes.
C'était aussi avant la francisation survenue au cours du XXème siècle une frontière linguistique entre le breton cornouaillais et le breton vannetais au point que l'intercompréhension était rendue difficile d'une rive à l'autre du cours d'eau.
Enfin, de part et d'autre des rives de l'Ellé s'étendent le pays Pourlet et le pays de l'Aven, des pays qui diffèrent notamment par leur traditions vestimentaires.

Mais revenons à nos Osismes (prononcer Ossimes. L'étymologie se tire du mot celtique mor qui signifie mer, et de occis qui indique l'occident ; à rapprocher du nom du département du Finistère, littéralement Finis terrae, fin de la Terre (Penn-ar-Bed en Breton)).
Les Osismes sont un des peuples gaulois du groupe des Celtes armoricains. Leur territoire correspond approximativement à celui du département français du Finistère et à la partie occidentale de celui des Côtes-d'Armor.
Ce peuple est très mal connu bien qu'il soit cité dès le Vème siècle av. J.-C. par le carthaginois Himilcon sous le nom de Oestrymnis, qui désigne leur péninsule, puis au IVème siècle av. J.-C. sous le nom d'Ostimioi par le navigateur grec Pythéas1 situant leur territoire dans les parages de l'île d'Ouessant et d'un cap Kabaïon, dont on ne sait s'il s'agit de la pointe de Penmarc'h ou de la pointe du Raz.
Les Osismes sont peu cités par Jules César dans ses Commentaires sur la Guerre des Gaules et par les autres auteurs antiques. Outre César, ils sont ponctuellement mentionnés par Pline l'Ancien, Strabon et Ptolémée. Selon ces auteurs, bien que soumis à Rome en -57, ils auraient participé à la révolte des Vénètes en -56 et aux renforts gaulois à Vercingétorix assiégé dans Alésia. Yessss ! Rien que pour ça, ça valait le coût de faire ce petit rappel historique et de saluer la mémoire de ces Osismes !!!

Mais revenons à nos Roches du Diable ! C’est donc la rivière l’Ellé qui a creusé une vallée profonde avec des gorges aux versants abrupts de près de cent mètres.


 
Au sortir de ces gorges profondes, l’Ellé se transforme sur une distance de 300 mètres en un chaos rocheux impressionnant. Les gros blocs arrondis de granite encombrant le lit de la rivière sont le résultat du travail d'érosion de la roche par l'eau pendant des millions d'années.
Les eaux tumultueuses de la rivière dévalent la pente en se faufilant entre d'énormes rochers, donnant naissance à des rapides et des tourbillons.

 
Si en été, lorsque le débit de la rivière est faible, le site ne présente aucun danger, en hiver, lorsque le débit est important, les risques de noyade sont possibles en raison de la présence de tourbillons, notamment au niveau du trou du diable.
Mais justement, que vient faire le diable, ou Paolic, l’un des surnoms du diable en Breton, dans cette histoire ! Quoique finalement, ça n’est pas si surprenant lorsque l’on sait que le nom de la rivière Ellé vient de Ellez qui signifie en vieux Français… l’enfer !…
Eh bien, je m’en va vous raconter la légende ! Ou plutôt les légendes !...
Toutes ont à peu près le même début. Autrefois, dans la région vivait un diable. C’était le chef du pays et tout allait bien... jusqu’au jour (vers l’an 600) où arriva dans le pays voisin un certain Guénolé qui fonda une paroisse qui porte son nom (Locunolé) et se mit à prêcher une nouvelle religion. Au début, cela n’inquiéta pas notre diable. Puis, voyant qu’il perdait de plus en plus d’âmes, un beau matin Paolic décida de se défaire du prêcheur. Pour ce faire, il lui lança d’énormes roches. Mais Guénolé d’un signe de croix les fit dévier et tomber au bord de l’Ellé où elles sont encore aujourd’hui.
A partir de là, la légende devient des légendes !

La première raconte qu’à la suite de ces rochers jetés par Paolic, Saint Guénolé perd patience et s’en va trouver Paolic et un corps à corps s'engage. Satan s'agrippe au rocher et y laisse la trace de ses griffes.
 
 
Mais que peut le diable contre le pouvoir divin ? Malgré tous les efforts de Paolic, Saint Guénolé l'entraîna au fond de la rivière et depuis entre les paroisses de Locunolé, Guilligomarc'h et Querrien, il existe dans l'Ellé, un trou dont nul n'a jamais pu sonder la profondeur, c'est le trou du diable…
 
La deuxième légende raconte que Paolic, voyant que Guénolé parvenait à détourner les rochers qu’il lançait, se résolut de se contenter des clients de la rive gauche de l’Ellé et, pour être sûr que Guénolé ne franchirait pas la rivière, vint s’installer au milieu des cailloux. D’une roche, il fit un fauteuil (dans le dossier on peut toujours voir la trace de la bosse qu’il avait dans le dos). À l’abri, sous un rocher, il mit son cheval. Auprès de sa grotte, au bord de l’eau, il aménagea deux puits jusqu’au fond de la rivière. En promontoire, il installa sa cuisine, on peut y voir encore sa cuillère, sa fourchette et toute sa batterie de cuisine.
 
Une dernière légende (en tout cas à ma connaissance !) évoque qu’à la suite de la lutte homérique entre Paolic et Guénolé, Paolic est obligé de s’isoler de l’autre côté de l’Ellé. Après cette bataille, saint Guénolé a besoin d’un pont pour prêcher la bonne parole. Pour le construire, il conclut un pacte avec le diable. La première âme qui franchit le pont doit revenir au maître des Enfers. Mais c’est un écureuil que le saint envoie sur le parapet. Vexé, le diable s’enfonce dans l’Ellé, créant un insondable gouffre… En sautant sur les volumineuses roches garnies de mousses, en suivant le courant sur le chemin qui serpente sur la rive, vous aurez peut-être la chance de trouver ce passage dans lequel serait caché un trésor…
 
Mais bien souvent, l’enfer des uns est le paradis des autres, et c’est surement quand notre cher Paolic se déchaîne que la rivière Ellé fait le plus le bonheur des passionnés de canoë-kayak, et plus particulièrement de canoë-kayak en slalom. Les rapides de l’Ellé permettent même d’accueillir des compétitions nationales, voire internationales.
Les rapides des Roches du Diable sont en effet classés III-IV selon le niveau d'eau pour la pratique du canoë-kayak. Cette activité ne peut se pratiquer cependant qu'en hiver et au début du printemps, car le débit de la rivière est trop faible le reste de l'année. Trois parcours s'offrent aux kayakistes : le parcours du Haut Ellé qui va de la station de pompage de Barrégan au Grand Pont, celui du Moyen Ellé qui va du pont de Loge Coucou aux Roches du Diable et le parcours du Bas Ellé qui va de Pont Ty Nadan à Quimperlé. Le parcours du Moyen Ellé est long de 6 km, les trois-cent derniers mètres constituant les rapides des Roches du Diable. Le parcours du Bas Ellé comporte de nombreux déversoirs.
Voyez ces vidéos « remouantes » !
Vidéo 1 - Vidéo 2  (avec musique Bretonnante rock sympa !)

Rien à voir, mais une vidéo impressionnante au volant d’une voiture de rallye sur les routes des Roches du Diable :

Mais si vous ne pratiquez ni le kayak ni le rallye, vous pouvez vous adonner à la pêche (dans ce lieu du Diable et de l’enfer, idéal pour pêcher et/ou pécher ;-))
La rivière permet en effet aux pêcheurs de truites et de saumons de s’adonner à leur passion. Si ces deux poissons étaient rares dans les rivières bretonnes il y a encore quelques années, ils sont de retour.
Les Roches du Diable et l’Ellé peuvent aussi être tout simplement des endroits de promenade, de pique-nique et de proximité avec la nature. La vallée de l'Ellé a pu en effet préserver un environnement sauvage en raison d'une faible urbanisation et du caractère souvent très accidenté de ses versants.
 
 
La vallée de l'Ellé est un site du réseau Natura 2000. L'Ellé et ses affluents abritent une importante population reproductrice de saumons atlantiques :
 
 
ainsi qu'une population reproductrice sédentaire de loutres d'Europe :

 
Parmi les autres espèces remarquables présentes, citons la moule perlière d'eau douce, la lamproie de Planer et la lamproie marine, l'escargot de Quimper, le chabot :

 
Au vu de cette faune, ça ne vous étonnera pas que la rivière Ellé soit classée en « 1ère catégorie piscicole ». L'Ellé est par ailleurs la seule rivière classée « Rivière Sauvage de France » par le WWF.
Au cours de vos promenades aux Roches du Diable, vous pourrez apercevoir les restes du Moulin de Kerléon (voir sa localisation sur la carte en début de cette page).
Cet ancien moulin seigneurial dépendait du manoir disparu de Coativy (ou Coetdavid) à Locunolé, propriété de la famille de Kerléon à la fin du 15ème siècle ; il porte ainsi, entre le 17ème et le 19ème siècle, indifféremment le nom de Kerléon ou de Coativy.
Une pêcherie y est attestée en 1696 ; elle semble encore figurer sur le cadastre de 1828. Plusieurs dynasties de meuniers, dont les Evennou et Kerhervé, exploitent au cours des 18ème et 19ème siècles ce lieu essentiellement destiné à la mouture du blé.
Associant logement et mécanismes, le bâtiment conserve des éléments du 17ème siècle mais a été, en grande partie, reconstruit en 1864 comme l'indique une date figurant sur une souche de cheminée. Le moulin a été désaffecté au début des années 1970. Il avait la particularité de posséder deux roues aux axes parallèles :
 
 
Hélas, le temps a fait son œuvre. Vous ne pourrez donc plus voir ces deux belles roues, qui étaient pourtant encore présentes fin 2008…


Mais il reste tant de merveilles de la nature sur ce site plein de légendes. Je reprendrai intégralement une phrase trouvée sur un site internet à propos de ce lieu magique : « Quand le soleil joue dans les feuillages, c’est un paradis de chlorophylle et de sculptures de granit poli, bruissant dans le vif ruissellement de l’eau et le gazouillis joyeux des oiseaux. »
 
 
 
Bonne promenade ! Et attention à Paolic !

3 commentaires:

  1. je n'ai pas croisé en chemin Paolic,juste l'intrépide Gwénolé qui veille sur ce lieu mythique!!!
    Anne

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  2. Je connais très bien les rives de l'Ellé grâce à une sortie organisée par un groupe de la LPO.

    [url=http://www.servimg.com/view/12946234/1169][img]http://i38.servimg.com/u/f38/12/94/62/34/p1180410.jpg[/img][/url]

    L'Elle en contre-bas des Roches du Diable

    Fanny

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  3. Savez vous combien de kilomètres fait la randonnée dont vous donnez le plan en ouverture de ce post ? Merci !

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